LA CLASSE MATERNELLE • N° 285 • 01/2020 •
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CHRONIQUE D’ ÉCOLE
P A R
C H R I S T O P H E B A U D O T ,
I S F E C L ’ O R A T O I R E
Humeurs…
La lecture d’articles sur les
théories de l’attachement
1
m’amène à questionner la
relation pédagogique. Quelle
posture adopter en maternelle
par rapport à de si jeunes élèves ?
Comment se positionner face à
des enfants qui découvrent les
codes scolaires ?
Je me demande en premier
lieu ce que les enseignants
représentent aux yeux des tout
jeunes enfants qui découvrent
l’école maternelle. Sont-ils
des personnages inquiétants ?
Paraissent-ils plutôt rassurants ?
Les petits d’hommes découvrent
un univers particulier avec ses
règles, comme la mise
en rang, et avec une
forme d’apprentissage
originale, en groupe.
Sans doute se
questionnent-ils,
consciemment ou
non, sur la relation
tissée avec cette
nouvelle personne
qu’il faut partager
avec tout un groupe,
et qui est un passage
obligé.
Chaque nouvelle
année, je vois certains
de mes nouveaux
élèves m’interroger du regard,
scruter l’horizon relationnel en
me fixant ou, au contraire et
de manière furtive, en jetant
de fréquents coups d’œil vers
moi comme pour vérifier si
mon regard se tourne aussi,
parfois, vers eux. Le sachant,
je prends soin aujourd’hui
d’installer une observation
à double sens, je consacre
du temps à ces moments de
« repérage ». Je commence par
m’asseoir et regarder ce qui
se passe dans la classe. Ainsi,
je me rends disponible à ceux
qui souhaiteraient un lien plus
proche, je croise des regards,
j’échange des sourires, je
m’efforce d’observer même
furtivement chacun de mes
élèves. Et j’offre mes bras à qui
en ressent le besoin. À l’inverse,
une fois le temps d’accueil passé,
je romps ce lien de proximité en
me levant.
La particularité de ce si jeune
âge fait de l’émotion non
maîtrisée une dominante qui,
dans cet environnement collectif,
peut difficilement trouver une
réponse satisfaisante chez les
enfants fragiles. Autrefois,
l’injonction professionnelle était
qu’
« on n’est pas là pour aimer les
enfants »
. Fort heureusement,
aujourd’hui, l’idée force
est qu’un lien
d’attachement peut
exister entre un élève
et son enseignant et,
plus encore, que ce
lien sert les intérêts
pédagogiques car il est
un puissant catalyseur
d’apprentissages.
L’enfant a besoin de
ce lien indicible qui lui
permet de grandir.
C’est son carburant.
1. Notamment le numéro
spécial de
Sciences
humaines
de mai 2019.
© C. Baudot
La juste distance