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• LA CLASSE • N°277 • 03/2017
SAUVE QUI PE !
P A R
É L É A N O R E ,
P R O F E S S E U R D E S É C O L E S
Humeurs…
Humeurs…
Depuis décembre dernier, on nous
rebat les oreilles au moins une
fois par semaine avec les scores
obtenus par la France à l’enquête
PISA. Si j’ai bien compris, ce
Programme International pour le
Suivi des Acquisitions des élèves
de 72 pays compare tous les
3 ans les compétences des élèves
de 15 ans en lecture, sciences et
mathématiques. Ces tests datent
du printemps 2015. Et nous
n’avons eu les résultats qu’en
décembre 2016. Un peu long,
le retour ! Faudrait songer aussi
à réformer les analystes du PISA…
Ce comparatif existe donc depuis
bientôt 70 ans, mais il semble que
les médias l’aient découvert il y
a peu. Oui, avant, chacun devait
se comparer avec lui-même ou
son voisin le plus proche. De ce
fait, les pays pouvaient se cacher
derrière leurs résultats nationaux
sans craindre l’analyse des autres.
Mais maintenant, par l’effet de
la mondialisation, tôt ou tard, on
finit par nous retrouver…
Ainsi, selon certains, notre score
ferait stagner notre pays à peine
dans la moyenne, qui devrait
être aux alentours de 36 (sur 72).
Pourtant, la France occupe la 26
ou 27
e
position selon la matière,
derrière les États-Unis. Derrière les
États-Unis ? Mais comment cela
se peut-il ? À vouloir se distinguer
toujours plus, la France confirme
son désir d’exception jusque dans
son Éducation nationale en faisant
la part belle à nos cousins
d’Amérique. La célèbre
french
touch
! Ouf ! La « trumpisation »
des esprits nous permettra
certainement de les dépasser en
2018.
Les gagnants
Aussi, on nous jette au tableau
l’éternelle place de la merveilleuse
Finlande portée aux nues, grande
5
e
et 1
re
des pays européens. En y
regardant de plus près, 8 pays
asiatiques font partie de la tête
de classe. Tient-on compte de
la manière d’enseigner dans ces
pays vainqueurs ? Régulièrement,
des reportages sur leurs écoles
montrent un répétiteur faire
défiler des images associées aux
mots oralisés durant plusieurs
minutes, jusqu’à ce que cela
soit bien ancré dans l’esprit des
bambins de 2 ans. Ou encore les
familles contraintes de cumuler les
emplois afin de payer des cours du
soir indispensables à l’intégration
des études supérieures.
Un inspecteur partageait son
étonnement quant au choix
des catégories de population des
élèves proposés par chaque pays.
Il serait notoire, dans les hautes
sphères de l’Éducation nationale,
qu’elles varieraient d’un pays
à l’autre. Les élèves choisis
par Singapour, par exemple,
proviendraient de la haute société
de l’îlot asiatique. Un peu comme
si notre échantillon français
provenait uniquement de Neuilly.
Obtiendrions-nous alors les
mêmes scores ?
Nos voisins britanniques et
allemands, ex-æquo, nous snobent
de 10 bonnes places, mais le grand
gagnant de l’Eurovision du PISA
est… le Portugal ! Ce pays en crise
a réalisé une superbe remontée
de 12 places malgré un budget
de l’Éducation moins important
et un traitement des professeurs
revu à la baisse (mais toujours
parmi les fonctionnaires les mieux
payés d’Europe, supérieur d’au
moins 20 % à celui d’un juge).
Force est de constater que ce
serait de leur austérité que
nos amis lusophones auraient
trouvé leur salut. « L’élève au
cœur des apprentissages »,
une concentration sur la langue
maternelle et les mathématiques.
Le remède miracle : pas de
fioritures.
PISA
&
cie