Table of Contents Table of Contents
Previous Page  121 / 124 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 121 / 124 Next Page
Page Background

LA CLASSE MATERNELLE • N° 276 • 02/2019 •

121

CHRONIQUE D’ ÉCOLE

P A R

C H R I S T O P H E B A U D O T ,

P R O F E S S E U R D E S É C O L E S

Humeurs…

J’ai été témoin tout récemment

d’une illustration édifiante du

danger du trop-plein d’écrans.

Recevant des parents d’élèves

lors d’un entretien habituel

d’évaluation, je constate une

grande excitation de leur fils

et de son petit frère. Les deux

enfants ne parviennent pas à se

contenir et se comportent en

électrons libres.

Les parents évoquent leurs

professions très prenantes qui les

obligent à se lever tôt et rentrer

tard. La maman travaille à plein

temps et assume seule le lever

et le coucher.

Au bout d’un moment, je pose

la question fatidique : est-ce que

votre fils regarde la télévision ou

d’autres écrans ? La réponse de la

maman ne se fait pas attendre :

« Étant seule et pressée, je suis

obligée d’utiliser la télé pour occuper

mon fils.

– Combien de temps la regarde-t-il

chaque jour ?

– Pas trop, mais c’est vrai qu’il en est

devenu accro.

– Plusieurs heures ?

– Oui. Il la réclame même avant

d’aller se coucher et fait des caprices

jusqu’à ce que je cède. »

Cet enfant est visiblement

parvenu à un état de dépendance

aux écrans. Son attitude est

également agitée en classe.

Son niveau de langage est très

faible : à trois ans et demi,

il s’exprime et prononce de

façon très approximative et

incompréhensible :

« A ba ya ma

tutu »

(Là-bas il y a ma voiture).

Il ne tient pas compte de son

interlocuteur mais détourne

le regard, ne répond pas aux

questions. Il ne tient pas

compte, non plus, des autres,

de l’environnement social de

la classe, criant et jouant seul.

Il semble déconnecté de la vie

collective.

Cela corrobore bien les

descriptions médicales ou

scolaires qui mettent en cause

les écrans : agitation, troubles du

langage et de la concentration,

difficultés de communication.

Depuis quelques années, je

ne manque pas de poser la

question aux familles dont les

enfants ont des symptômes

équivalents. Assez souvent,

les écrans reviennent comme

causes évidentes de ces troubles.

Et pourtant, au premier abord,

les difficultés de cet enfant

ne m’avaient pas alerté.

Depuis, cette famille a stoppé

complètement la télé. Leur

enfant ne la réclame même plus.

Et, comme par enchantement,

sa parole commence à devenir

compréhensible. 

Attention écrans

© Ivica Drusani-Shutterstock