Nous parlons souvent d’eux, les syndicats font entendre leurs revendications, mais les témoignages des enseignants passent inaperçus. Sur les réseaux sociaux, ils s’organisent en groupes et partagent leur détresse, leur colère, leurs conseils et se soutiennent.
« J'veux changer peut-être pour un métier où je pourrai au moins choisir de me former selon mes besoins », annonce Séverine dans un groupe Facebook réservé aux enseignants. Ils sont plus de 75 000 membres et postent chaque jour leur colère ou leur tristesse face au constat d’un métier en crise. Sur X, Instagram ou TikTok, les professeurs s’emparent des espaces médiatiques à leur portée pour faire entendre leurs messages.
Des groupes pour les laissés pour compte
Au-delà des arguments déjà connus de la crise de recrutement et des conditions de travail difficiles pour les enseignants, une idée revient souvent : celle que tout le monde déteste les professeurs. « Nous sommes perçus par ceux au pouvoir et par une partie de l'opinion publique comme des feignants gauchistes » ; « La majorité de la population est contre nous, et depuis un moment déjà » ; « quand on voit le prof-bashing ambiant dans les médias, on comprend pourquoi » ; « les éternels boucs émissaires ». Perte de confiance envers les politiques, envers les médias, ces professionnels se sentent abandonnés et incarnent l’idée d’un « seul contre tous ». Ils dénoncent également des conditions de travail « cauchemardesques ». Avec une classe de 32 élèves (15 PS et 17 MS), Guillaume a « bien peur » de l’année scolaire qui l’attend.
Les organisations syndicales critiquées
Pourtant, les enseignants ne sont pas seuls, des associations de parents d’élèves les soutiennent, et les syndicats ne cessent de se mobiliser. Mais ils n’ont pas la cote. « Nos syndicats ne veulent de toute façon pas lutter contre notre déclassement salarial », lance Éric sur Facebook. « Les syndicats de l'EN sont frileux et ne veulent jamais faire de vagues »,ajoute Marco. Sur X, les posts du Snuipp-FSU reçoivent aussi leur lot de critiques. Krystina se dit « impressionnée par l'absurdité de la stratégie de la FSU, qui grille inutilement une cartouche avec cette grégrève ». « Tout le monde se plaint mais personne ne fait grève. Ca fait des années... », nuance Mathiard, suivi par Philippe, Julien, Nico et Arnaud. Sur Instagram, Véronique déplore également le manque d’engagement de ses collègues : « j’aurais bien aimé boycotter ces évaluations mais difficile quand toute l’équipe ne suit pas ». Toutefois, de nombreux enseignants du groupe souhaitent un « appel unitaire et national » à la grève pour marquer le coup. Aussi, les syndicats reçoivent quelques messages de soutien sur leurs réseaux.
Lorsque l’on étudie les posts, groupes et messages des enseignants, il en ressort un sentiment d’abandon et de crainte face à la rentrée et aux conditions d’exercice de leur métier. Des observations en accord avec les conclusions de plusieurs études menées sur ce sujet.