Ortho-grave

Publié le 22 septembre 2016 par Ivan

Si, en 1990, le comité chargé de rectifier l’orthographe s’était contenté d’abolir les anomalies et incohérences les plus flagrantes de la langue française, s’il s’en était tenu à créer des régularités là où exceptions et cas particuliers règnent inutilement… sans doute la réforme aurait-elle été applaudie comme une simplification salutaire et serait aujourd’hui, en dépit des protestations de quelques nostalgiques de la dictée de Mérimée et de ses chaussetrappes, unanimement adoptée.

 

Ortho-grave

Malheureusement, certaines modifications moins légitimes, plus discutables comme la suppression de l’accent circonflexe sur le i et le u, ont hérissé à juste titre bon nombre de gens, et freiné le zèle qu’ils auraient mis, sans cela, à appliquer la réforme. L’orthographe ainsi rectifiée semble en effet faire fi de la dimension esthétique de la langue écrite, à laquelle participe, qu’on le veuille ou non, l’accent circonflexe. Le maître qui voit son accent tomber dans l’abîme (pardon, l’abime) ne perd-il pas du même coup un peu de sa majesté, de son autorité, de sa prestance ?

En outre, dès lors que les nouvelles règles génèrent, comme c’est le cas, de nouvelles et nombreuses exceptions, comment parler encore de simplification ?

 

La simplification ne sera en tout cas pas pour les professeurs des écoles qui devront désormais gérer et justifier la coexistence de deux orthographes : d’un côté celle des manuels scolaires qui appliquent les rectifications de 1990, de l’autre celle, toujours largement usitée, de tous les autres médias. Y compris certains documents ministériels comme le Socle commun de connaissances, ou même les nouveaux programmes où subsistent encore, ici et là, quelques maîtrises mal maitrisées ! Y compris aussi – et c’est bien là le problème – les livres et albums de jeunesse qui, en primaire, restent des supports privilégiés pour l’apprentissage de la langue.

 

Entre orthographe recommandée (moderne ? au rabais ?) et orthographe acceptée (traditionnelle ? élitiste ?), il va donc falloir désormais jongler. Jusqu’à ce que l’usage, tout naturellement, finisse par avoir le dernier mot…

EDITO de La Classe - Octobre 2016

 

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