Après les révélations de Mediapart au sujet du collège-lycée privé Stanislas où les enfants de la ministre sont scolarisés, ses justifications semblent être mensongères. Que faut-il retenir de cette affaire ?
Arrivée le 12 janvier à la tête du ministère de l’Éducation nationale, Amélie Oudéa-Castéra est déjà en mauvaise posture. Le jour même, Mediapart révèle que les enfants de la ministre sont scolarisés au collège-lycée privé Stanislas, un établissement catholique aux classes non-mixtes dont les « enseignements condamnent l’homosexualité, l’avortement et le rapprochement entre les filles et les garçons » selon le journal. Plusieurs investigations menées par Mediapart sur le collège-lycée Stanislas ont révélé des faits inquiétants, poussant le ministre de l'époque, Pap Ndiaye, à lancer une enquête administrative sur celui-ci.
Les « mensonges » d’une ministre
Interrogée sur son choix, Amélie Oudéa-Castéra invoque les « paquets d’heures pas sérieusement remplacées » dans l’école publique Littré, où son fils aîné, Vincent, a été scolarisé pendant six mois. « À un moment, on en a eu marre », poursuit-elle, « scolariser nos enfants à Stanislas était un choix de proximité ». « La République travaille avec tout le monde dès lors qu’on est au rendez-vous de cette exigence et de ces valeurs », termine la ministre. L’association de parents d’élèves de l’école Littré dénonce des « propos très réducteurs et stigmatisants » et assure qu’à Littré aussi, les enfants bénéficient d’un « cadre sécurisant et sécurisé et effectuent une scolarité dans de bonnes conditions ». Florence, enseignante de la classe de petite section dans laquelle était inscrit le fils d’Amélie Oudéa-Castéra en 2009, est interrogée par Libération le 14 janvier. Elle confie au journal qu’elle n’a « pas été absente » et qu’il « n’y a jamais eu de problème de remplacement à Littré » à cette époque. Faits confirmés par Mediapart, qui relève que la professeure n’a manqué que trois jours d’école et que les enfants ont été pris en charge par le directeur de l’établissement, lui aussi enseignant à Littré.
Mercredi 17 janvier, la ministre assure qu’un « seul cas d’homophobie est révélé dans le rapport d’inspection » du collège-lycée Stanislas. Des faits démentis par les documents officiels rendus publics par Mediapart. Des « mensonges » à répétition qui ont du mal à passer auprès du corps enseignant et des syndicats.
Qui sème la misère récolte la colère
Que l’Éducation soit dotée d’une « ministre à mi-temps » agaçait déjà Sud-éducation, mais les propos d’Amélie Oudéa-Castéra ont renforcé la colère des syndicats enseignants. Le Snes-FSU dénonce un discours « lunaire », qui représente une « violente charge contre l’enseignement public, jetant le discrédit sur la qualité de l’encadrement » et appelle les enseignants à participer à la grève du 1er février pour exiger d’être « mieux payés, respectés et protégés ». Le FSU s’inquiète également du « silence de la ministre sur les problèmes mis en évidence au lycée Stanislas (vision sexiste, homophobe et réactionnaire de l’enseignement, l’IVG y étant par exemple assimilé à un 'meurtre') ».
Nombreux sont les professionnels de l’éducation à faire preuve de défiance vis-à-vis d’Amélie Oudéa-Castéra, comme en témoigne la multitude de réactions sur X suscitée par son passage à Télématin le 17 janvier. « Vous n’avez pas la confiance des enseignants et de la communauté éducative », « je n’ai pas confiance en vous », « elle n’est plus crédible à nos yeux », « ses propos ont révélé une pensée politique qui n’est pas en accord avec sa mission, comment pouvoir faire confiance ? » : les internautes sont nombreux à partager cet avis et réclament, comme des membres de l’opposition, la démission de la ministre.