Trois décrets pris en application des accords de revalorisation PPCR (Parcours professionnel, carrières et rémunérations) sont parus au JO du 7 mai 2017. Ils concernent toutes les catégories d’enseignants, du professeur d’école au professeur agrégé, du public comme du privé sous contrat. Parmi ces textes, portant d’une façon générale sur les carrières et la rémunération, l’un définit les contours d’une réforme de fond de l’inspection individuelle. Il en renouvelle les bases, les principes et les modalités pratiques, cela dès la rentrée 2017. 1
L’idée de base est de réinscrire les corps enseignants dans la règle générale et désormais commune de tous les membres de la fonction publique. Il y a, globalement, quatre grands piliers dans cette réforme :
1) Déconnecter la notation de l’avancement
2) Passer d’une logique de contrôles à une logique d’évaluation par compétences
3) Introduire une dimension d’autoévaluation
4) Renforcer l’accompagnement pédagogique des enseignants
Notation et avancement
Très clairement, désormais, l’avancement (passage d’un échelon à l’autre et passage d’un grade à l’autre) est déconnecté de la notation. Exit donc la triple cadence de progression que l’on connaissait sous la forme de changement d’échelon au « grand choix », « choix » et « ancienneté ». À la traditionnelle visite tous les 3 ou 4 ans (dans le meilleur des cas) de l’inspecteur de circonscription se substitue le principe de « rendez-vous de carrière » qui ne donneront pas lieu à l’attribution d’une note.
Ces « rendez-vous », au nombre de trois répartis tout au long de la carrière, serviront de supports à l’évaluation et à l’avancement.
Prévus aux 6e et 8e échelons pour l’avancement dans la classe ordinaire, et au 9e échelon pour le passage à la hors-classe, ces rendez-vous de carrière permettront à l’IEN de proposer éventuellement à l’autorité académique (le DASEN) un « avancement accéléré » à l’échelon supérieur. Le DASEN prononcera cet avancement dans le cadre du contingent qui lui sera attribué (plus ou moins 30 % d’une promotion). Concernant le passage à la hors-classe, il sera donc possible à partir de la deuxième année dans le 9e échelon, selon les mêmes dispositions.
Sur la forme, la phase d’observation de la classe est préservée mais elle sera suivie (ou précédée) d’un entretien approfondi entre le professeur et l’inspecteur portant sur la carrière : passé et perspectives.
À noter aussi la création d’une « classe exceptionnelle » qui sera, entre autres, accessible aux professeurs d’école ayant enseigné au moins 8 ans « dans des conditions d’exercice difficiles » ou « sur des fonctions particulières ». Une authentique reconnaissance pour l’éducation prioritaire ! Peut-être aussi pour les directeurs d’école ?!
Du contrôle à l’évaluation par compétences
L’idée est bien de renforcer la dimension évaluation au détriment des seuls contrôles (tenue des documents obligatoires, assiduité des élèves…) qui demeureront car ils sont réglementaires. Mais évaluer, c’est d’abord chercher la valeur du travail effectué ; on revient donc à cette idée.
L’annexe 1 du texte propose une grille d’évaluation commune à tous les enseignants. Onze compétences, inspirées des différents référentiels, sont à évaluer selon l’échelle suivante : « à consolider », « satisfaisant », « très satisfaisant », « excellent » (cf. document ci-contre).
Une véritable dimension d’autoévaluation
À l’image de ce qui se fait déjà dans d’autres secteurs de la fonction publique et dans d’autres corps des personnels du MEN, l’autoévaluation sera promue.
Au moyen de l’entretien lui-même, mais aussi par la possibilité effectivement laissée aux intéressés de faire part de leurs propres observations, au verso du support officiel, après l’appréciation littérale de l’inspecteur.
Sans aucun doute, localement, des initiatives plus approfondies pourront voir le jour sous des formes de contrats de progrès, contrats de formation...
Renforcement de l’accompagnement des enseignants
Un objectif affiché de cette réforme est de dégager du temps pour les inspecteurs et les autres formateurs pour renforcer le suivi et l’accompagnement pédagogiques des enseignants. Entre les trois rendez-vous de carrière, cet accompagnement est expressément demandé par le ministère. Il est préconisé sous une double forme, individuelle et collective (suivi des équipes).
Il devra être mis en oeuvre à tous les niveaux de la carrière et, d’une façon encore plus marquée, au service des enseignants débutants (stagiaires, 1res, 2es et 3es années notamment) qui ne sont pas concernés par ce nouveau dispositif démarrant au 6e échelon.
Pratiquement, chaque professeur concerné sera individuellement informé, avant les vacances d’été, de la programmation d’un rendez-vous de carrière dans la prochaine année scolaire. « Une notice présentant les enjeux et le déroulé du rendez-vous de carrière sera jointe. » Une fois notifié à l’agent, le compte rendu du rendezvous pourra être enrichi des éventuelles observations qu’il souhaite formuler, « dans un délai de trois semaines ». « L’appréciation finale de la valeur professionnelle est notifiée dans les deux semaines après la rentrée scolaire suivant celle au cours de laquelle le rendez-vous de carrière a eu lieu. »
Auteur : Guy Vermée
1. À l’heure où nous écrivons ces lignes, le tout nouveau ministre de l’Éducation nationale n’a pas évoqué la possibilité de revenir sur ces décrets.